« Un écrivain qui aime se répéter », commente dom Guillerand

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Au verset 2 du Prologue de Jean, dom Guillerand note à bon droit le mouvement spécial de la pensée de l’évangéliste : un mouvement circulaire qui aime se répéter pour mieux comprendre. Écoutons-le :

Il était donc au commencement chez Dieu (Jean 1, 2)

« Jean se répète ; il reprend sa formule ; il éprouve le besoin de rester un instant sur ces hauteurs, en face de cette réalité qui pour lui est tout. Car il vit ce qu’il exprime; son évangile, c’est sa vie. C’est son âme qu’il exprime ; il contemple Celui qu’il aime, en même temps qu’il en parle ; il le regarde longuement dans la demeure où celui-ci l’a introduit ; il sait que ce regard prolongé qui procède de l’amour engendre la lumière et rentre dans l’amour où il s’achève.

De là le mouvement si spécial de sa pensée : elle avance lentement, parfois elle s’arrête ; elle semble même reculer de temps en temps, et comme revenir en arrière pour mieux prendre possession de son objet et en jouir. Mouvement circulaire qui part d’un centre comme d’un foyer, qui s’y déploie et y reste ; mouvement de vie qui ne s’écarte pas de son principe mais s’y unit et le développe de son propre développement et de cette union à lui. Nos esprits rectilignes en sont tout d’abord déconcertés. Nous croyons qu’avancer c’est aller d’un point à un autre … et cela est vrai quand le point initial est néant ou indigence. Quand c’est l’Être même, le développement ne peut se faire qu’en lui, dans la communication de plus en plus accueillie de son être.

Voilà pourquoi Jean reprend sa pensée, et la répète, et nous redit sans se lasser, sans crainte de nous lasser, pour nous entraîner après lui, et à la suite du Verbe lui-même, sur la route d’amour : « Il était là dès le commencement chez Dieu ». Le Verbe était l’hôte de Dieu, il était là dans la demeure qui est Dieu même ; et il était cette demeure, comme il était Dieu … Car il était l’image parfaite qui reproduisait parfaitement la perfection infinie. Il était ce qu’elle est ; il faisait ce qu’elle fait ; il l’exprimait ; il était sa Parole, son Verbe. Cependant, il ne se confondait pas avec elle ; il s’en distinguait autant qu’il était, il s’en distinguait par tout son être. C’est cet être qui s’opposait, c’est-à-dire qui se posait en face de lui-même, et qui se répandait de l’un à l’autre. En lui, ils étaient unis et ne faisaient qu’un. Par lui, ils étaient distincts et opposés; par lui, ils se regardaient et se donnaient mutuellement. Regard éternel, union éternelle, unité parfaite et infinie, et néanmoins (ou mieux à cause de cela) distinction éternelle et parfaite, opposition éternelle et parfaite, position éternellement opposée, face à face, pour se regarder, se donner, s’unir.

Je me répète moi aussi … et je ne crains pas de le faire. Avec Dieu il faut le faire. Dieu ne dit qu’une chose ; il ne fait qu’une chose ; il se répète sans fin. Quand un mot dit tout, on ne peut que le répéter. Quand on se donne tout dans un acte, on ne peut que refaire cet acte. »

(Écrits spirituels, tome 1, page 97 s)

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3 commentaires pour « Un écrivain qui aime se répéter », commente dom Guillerand

  1. Bruce Herbert dit :

    Superb commentary. The whole thrust of the Gospel of John is different fron the Synoptic Gospels of Matthew, Mark, and Luke… Most of the themes in the synoptic Gospel stories, which were written in the years following the crucifixion of Jesus, rightly focussed on building the faith of the early Christian community, which was composed mostly of Jews… The Synoptic Gospels which were read in the early Church was of course foucused on rhe distinctions between the Jewish Law and the person of Jesus.. Is it lawful for Jesus to cure people on the Sabbath?
    . The Gospel of John, in contrast was written near the turn of the first century A.D. at a time when most of the people who were listening to stories about Jesus in Christian Chriches had not been born, and people had never met or heard Jesus when he was alive. It was a Christian community who had only heard about Jesus through their families, or by hearing about him in a gathering of Christians through the stories about him in the Synoptic gospels. Paul’s letters were also being including as he travelled far into the pagan world, to meet people who had never even heard about Jesus.

    The Gospel of John connects us from the very beginnings of creation where Jesus is described as present at the time of creation, present with a Samaritain woman at a well, speaks with her about « Living Water » present with a woman who is caught in adultery and is sublect to be stoned to death…

    The Gospel of John also tells us that our lives are all connected to each other and to one source… « I am the vine, you are the Branches… It is a message the belief leads us together to become connected… to the Father through his Spoken Word….independant of our membership to a tribe, or a nation,

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  2. Innocent Ndagijimana dit :

    Bonjour cher monsieur,que la grâce du Père vous couvre, et comment allez-vous? Ma famille vous salue et vous souhaite le meilleur!

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