Les lumières peuvent être nombreuses sur terre mais seule la Lumière vraie peut nous mettre en rapport intime avec Dieu. Le Verbe est la Lumière vraie qui illumine tout homme venant en ce monde. Écoutons les explications toujours à point de ce cher dom Guillerand:
Celui-là était la Lumière vraie qui éclaire tout homme venant en ce monde
(Jean 1, 9)
« Après avoir présenté le grand témoin, l’évangéliste présente Celui dont il témoigne … et par lequel il est grand. « Celui-là », saint Jean laisse percer à chaque instant son intimité divine. Pour nous, ce pronom peut être imprécis et sa phrase peu claire. Pour lui, « celui-là » est d’une clarté absolue: c’est celui auquel il pense sans cesse, qui emplit toute son âme. Voilà la vraie lumière; voilà le principe de toute lumière et de toutes choses. Il nous l’a dit: « Par lui tout a été fait … En lui était la vie, et la Vie était la lumière des hommes ». Il le redit; il se donne la joie de le redire; et cette joie est si vraie que, si nous ne sommes pas entièrement fermés à sa pensée, elle se communique à nous. On l’écoute, on lit et relit, et on entrevoit peu à peu que le long contact avec cette lumière fait lever dans l’âme un jour nouveau: « Celui-là était la Lumière vraie ».
Il y a des lumières dans le monde. Ces lumières sont douces et belles; elles versent aux yeux ou à l’esprit de vraies clartés. La première lueur qui se répandit à la surface de l’abîme, l’aurore qui brilla sur les choses quand le soleil se prépara à sortir du nuage qui l’enveloppait, la lumière plus haute qui guidait la première radicelle de la première fleur vers l’humus nourricier du sol qui l’entourait, celle qui dirigeait l’animal vers sa proie, celle qui dans l’intelligence d’Adam savait percevoir l’Être même dans les êtres, c’étaient de vraies lumières, mais ce n’était pas la Lumière vraie. Le Verbe est la lumière vraie qui illumine tout homme venant en ce monde parce qu’à tout homme il dit ce qui est. C’est lui qui éclaire la raison humaine et la met en rapport exacte avec l’Être. Il montre dans les êtres créés des images de l’Être incréé: images seulement! Une image fait connaître ce qu’elle représente; il ne faut pas s’y tromper; on ne doit pas s’arrêter à elle; il faut la dépasser et rejoindre par elle, en elle, la réalité dont elle est l’image. Sinon, on reste dans la vanité et le mensonge.
Au fond secret d’un homme qui vient au monde, une voix crie: « Le monde et tout ce qu’il contient n’est pas l’Être qui est, il est son œuvre ». Il est une image plus ou moins lointaine de lui; c’est la voix du Verbe en nous; c’est la Lumière vraie qui brille en tout homme. Lumière de la raison en tous; lumière de la grâce dans ceux que la foi éclaire; lumière enfermée dans les créatures inférieures elles-mêmes pour que l’homme pût percevoir ce rapport qui les unissait à Celui qui est. »
(Écrits spirituels, tome 1, page 108 s)