Chartreuse de la Valsainte (Suisse)
À la veille de la fête du Baptême de Jésus, voici ce qu’en dit dom Augustin Guillerand (†1945), moine chartreux et écrivain spirituel, dans son commentaire sur l’évangile de Jean. À noter, la propension de l’auteur à utiliser l’image de la lumière en parlant de chacune des Personnes de la Trinité … comme si l’éblouissement du mystère l’empêchait d’y voir autre chose:
« La présentation de Jésus par Jean le Baptiste est de toute beauté et de toute profondeur. La Lumière vraie éclaire magnifiquement son témoin. Dans ce simple Galiléen qui pouvait être d’assez pauvre mine elle lui montre le Sauveur du monde. «Voilà celui qui ôte le péché du monde».
Les Juifs avaient, grâce à la Révélation, une juste idée du péché et de ses conséquences. Toute la Bible est l’expression de cette idée. Le Désiré des nations était celui qui secouerait ce joug, et ce qu’on attendait de lui était avant tout cette libération. Le péché avait éteint dans l’âme humaine cette clarté vraie qui montrait la vraie vie et qui la faisait couler de Dieu en elle. Dieu était là, il continuait de communiquer son Être, il restait le Créateur mais il ne donnait plus sa Vie (qui est de connaître et d’aimer). Il n’était plus Père, il n’engendrait plus dans l’âme son Verbe, il ne répandait plus en elle son Esprit d’amour. L’âme ne le connaissait plus dans la lumière de ce Verbe, elle ne l’aimait plus dans cet Esprit d’amour; elle n’était plus animée dans ce souffle qui chasse les ténèbres. Elle était animée d’un autre souffle, éclairée d’une autre lumière, elle n’était plus l’enfant de Dieu, elle était l’esclave du péché.
Le Rédempteur attendu devait secouer ce joug, rétablir le contact avec la Lumière et refaire de l’homme un fils de lumière. Et Jean, témoin de la Lumière, disait aux hommes qui attendaient depuis si longtemps: «Voilà celui qui ôte le péché. Voilà la grande lumière, la Lumière qui est la Vérité et la Vie, la Lumière qui montre l’Amour, le don de Dieu à l’âme.»
Comment Jean a-t-il pris contact avec cette lumière? Comment s’est-elle manifestée à lui pour qu’ensuite il nous la manifeste? «J’ai vu l’Esprit Saint sous forme de colombe qui descendait sur lui et s’y reposait.» Jean a vu une colombe et dans cette colombe l’Esprit Saint; il l’a vu descendre du Ciel et se reposer sur la tête de Celui qui venait pour être baptisé. Jean a reconnu l’Agneau qui ôte les péchés du monde dans l’éclat d’une lumière, et cette lumière est la Lumière exilée du monde depuis le péché. La Lumière repose sur la tête de Celui qui est là pour recevoir son baptême. »
(Écrits spirituels, tome 1, page 136 s)