Dans son commentaire de l’évangile de Jean, dom Guillerand s’attarde sur le personnage de Nicodème. Docteur de la Loi et personnage très en vue, celui-ci est intrigué par le ministère de Jésus; homme sincère, il veut rencontrer le jeune maître pour avoir des éclaircissements. La démarche de Nicodème inspire encore aujourd’hui une foule de croyants qui, bien que timidement, veulent obtenir des réponses à leurs questions. Écoutons dom Augustin à ce sujet:

« Cet entretien avec Nicodème (Jean 3, 1-21) est proprement le premier discours doctrinal du divin Maître. Jusque-là, il n’avait qu’agi. Les paroles prononcées se rattachent aux actes accomplis et ne représentaient pas un enseignement. Ici encore il enseigne, et du premier coup il projette sur Dieu, sur le ciel, sur les rapports de Dieu avec la terre, sur la mission qu’il y vient accomplir, sur la façon dont il l’accomplira, sur l’attitude des hommes à son égard, sur les conséquences de cette attitude, des lumières immenses, définitives, ces lumières très spéciales, uniques qui illuminent tout, qu’on peut lire, relire, méditer, approfondir sans les épuiser, mais au contraire en voyant sans cesse reculer ce fond qu’on poursuit, et qu’on ne retrouve jamais, car elles sont la Lumière même.

Nicodème est un personnage important, à la fois chef, docteur et pharisien. C’est en même temps une âme droite que la vérité intéresse et touche. Il ne faut pas exagérer sa faiblesse qui le fait se cacher pour venir à Jésus. Ce n’était pas un héros, ni un homme vraiment fort. Mais la force qui eût été nécessaire est bien rare, et son manque de courage est si commun qu’on peut difficilement lui en faire un reproche. Il veut voir et savoir; il veut une entrevue. Il est plus à l’aise la nuit; il peut parler seul à seul; il dispose de plus de temps … bref, il peut avoir des raisons de choisir ce moment qui, sans exclure le respect humain, justifient ce choix. Il reste que les hommes en vue ne se donnent ni ne sont attirés et accueillis comme ces simples Galiléens qui déjà entourent le Maître. »

(Écrits spirituels, tome 1, page 187)