Au mont Horeb, Dieu s’est révélé au prophète Élie non dans le déchaînement d’une tempête mais dans le murmure d’une brise légère ( 1 Rois 19, 12). Il ne faut, en effet, que peu de choses pour éveiller notre attention à Dieu: silence, paix intérieure et humble disposition. Le silence résulte de l’absence du tintamarre quotidien, la paix de la conformité de notre conscience aux diverses normes, et l’humilité du sentiment de notre petitesse face au Très-Haut.
Si toutes les religions (et même un certain athéisme) prédisposent à des moments de contemplation naturelle, il faut bien avouer que notre religion judéo-chrétienne a ceci de particulier qu’elle y ajoute le contact avec un Être supérieur bien réel qui se distingue de toutes projections humaines: « Oui, je suis Dieu; il n’en est pas d’autre! » (Isaïe 45, 22). Ces moments de recueillement peuvent laisser en paix ceux qui s’y adonnent, mais, pour un chrétien, le profit est d’autant supérieur que cette paix devient une ouverture à l’action de l’Esprit Saint; la rencontre authentique du Dieu vivant, loin de nous séparer des autres, nous habilite au contraire à prendre notre place dans la société et dans le Corps mystique du Christ. La rencontre de Dieu avec le prophète Élie ne s’est pas soldée uniquement par l’accalmie du prophète déprimé mais l’a incité, en plus, à prendre des initiatives très concrètes: onction de son successeur (Élisée) et celles de généraux militaires destinés à supplanter divers rois de la région (1 Rois 19, 15s). L’histoire de la spiritualité chrétienne nous offre de nombreux exemples de contemplatifs devenus, par la force des choses, des hommes et des femmes d’action: saint Bernard de Clairvaux lors des problèmes de l’Église au 12e siècle, sainte Thérèse d’Avila et la réforme du Carmel en Espagne, sainte Catherine de Sienne et son influence bénéfique sur les Papes de son époque, etc.
Serions-nous réticents à cette forme de prière silencieuse qu’est la contemplation? N’ayons pas peur! Ces moments, jugés inutiles par plusieurs, peuvent devenir (par la grâce à Dieu) non seulement l’occasion de ressourcement spirituel mais également le point de départ d’une action humanitaire bénéfique.