Qu’il est difficile de s’évaluer soi-même ! Certains le font avec complaisance, d’autres avec humilité. Les premiers s’appuient souvent sur leurs propres critères alors que les seconds se réfèrent de préférence à des critères extérieurs. Les premiers sont aveuglés par une confiance exagérée en eux-mêmes, les seconds se laissent éclairer par une autorité en dehors d’eux-mêmes. Finalement, les premiers sortent de cet exercice avec une certaine paix intérieure bercée d’illusions … les seconds avec une certaine culpabilité baignée de réalisme. Voilà ce qui, à mon sens, explique non seulement la motivation des montées au Temple de Jérusalem du pharisien et du publicain de la parabole, mais aussi le résultat de leur démarche réciproque: la suffisance de l’un bloqua toute éventuelle amélioration alors que l’humilité de l’autre l’ouvrit à la réconciliation avec Dieu. Et pourtant, les deux avaient la lumière de la foi !
En introduisant sa parabole, le Seigneur nous en donne le but, qui est de stigmatiser deux états d’âme souvent rencontrés chez certains croyants: la suffisance vaniteuse et le mépris du prochain : « Il dit encore, à l’adresse de certains qui se flattaient d’être des justes et n’avaient que mépris pour les autres, la parabole que voici » (Luc 18, 9). Hélas, ce genre de pharisaïsme nous guette nous aussi à tout moment. Oh oui, nous, qui cherchons à plaire à Dieu (ce qui est très louable) en nous laissant aller à des comparaisons (ce qui est très humain) avec quelquefois une certaine inclination méprisante envers les autres (ce qui est fort peu charitable). Il ne s’agit pas de vivre en vase clos, car il y aura toujours des personnes meilleures ou pires que nous (les comparaisons sont quasi inévitables), mais il s’agit avant tout de vivre dans le monde réel avec humilité et charité. Plutôt que de nous comparer aux autres, mieux vaudrait nous comparer à nous-même, à notre passé et aux multiples leçons qui en découlent. Refuser de se voir avec ses propres faiblesses peut inciter à se croire «arrivé», alors qu’on est toujours « en chemin ». La suffisance du pharisien de la parabole l’empêchait de voir ses carences et de rechercher aide et pardon, d’où un retour à la maison moins gratifiant que celui du publicain : « Je vous le dis, ce dernier descendit chez lui justifié, l’autre non ».
La solution? Vivre dans la vérité ! Car l’humilité s’identifie à la vérité éclairée par la foi, une humilité semblable à celle de la Vierge. Visitant sa vieille cousine qui la confirme dans sa vocation de mère du Messie, Marie chante et exprime sa reconnaissance pour la grâce reçue sans pour autant s’y attarder car elle se plaît à considérer cette grâce bien au-delà de sa vie privée : « sa miséricorde, dit-elle, s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent » (Luc 1, 50). Une humilité qui ne saurait exister sans une authentique charité envers Dieu et le prochain. C’est pourquoi Jésus, fruit lui-même de l’Amour du Père pour le monde, se fera un devoir de réhabiliter la charité comme fondement de toute la vie spirituelle : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur … et tu aimeras ton prochain comme toi-même. À ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes » (Matthieu 22, 37-40).
Merci pour ces bonnes paroles
J’aimeAimé par 1 personne