Au début de sa Règle monastique, saint Benoît parle des ermites en ces termes: «Animés d’une ferveur qui n’est plus celle de la première conversion, car une longue période de probation au monastère leur a appris, avec l’aide et les leçons de plusieurs, comment l’on tient tête au démon, ces moines, aguerris, sortent des rangs serrés de leurs frères pour affronter le combat singulier du désert, et, assurés de pouvoir se passer désormais de l’encouragement d’autrui, ils ne comptent plus que sur le secours de Dieu et sur eux-mêmes dans la lutte qu’ils soutiendront à la seule force de leur bras et de leur poing, contre les vices de la chair et des pensées » (Chap. 1). Le vingtième siècle a connu une certaine recrudescence de vocations d’ermite (hommes et femmes), surtout en France; plusieurs se rappelleront de dom André Louf, auteur spirituel de renom et moine de l’abbaye trappiste du Mont-des-Cats (Nord), qui se retira (après 35 ans d’abbatiat) dans un petit ermitage adossé à l’abbaye bénédictine de Sainte-Lioba (en Provence) où il vécu en solitaire durant 13 ans.
Dans son nouveau Code de droit canonique (1983), l’Église catholique a reconnu officiellement deux anciennes formes de vie consacrée (tombées en désuétude): la vie d’ermite et celle des vierges consacrées! Voici ce que dit le canon 603 au sujet des ermites: « §1. Outre les instituts de vie consacrée, l’Église reconnaît la vie érémitique ou anachorétique, par laquelle des fidèles vouent leur vie à la louange de Dieu et au salut du monde dans un retrait plus strict du monde, dans le silence de la solitude, dans la prière assidue et la pénitence. §2. L’ermite est reconnu par le droit comme dédié à Dieu dans la vie consacrée s’il fait profession publique des trois conseils évangéliques scellés par un vœu ou par un autre lien sacré entre les mains de l’Évêque diocésain, et s’il garde, sous la conduite de ce dernier, son propre programme de vie. » Comme on peut en conclure, la vie d’ermite «catholique» n’est pas laissée aux caprices d’un chacun mais elle suppose un minimum de maturité spirituelle ainsi qu’un lien étroit avec l’évêque du diocèse.
Ceci étant dit, qu’en est-il de l’ermite urbain? Les appels à la vie consacrée sont divers et difficiles à classifier. Force est d’admettre avec saint Paul, que « chacun reçoit de Dieu son don particulier, celui-ci d’une manière, celui-là de l’autre » (1 Corinthiens 7, 7). Pour plusieurs croyant(e)s, la vie urbaine s’est avérée une occasion providentielle de vivre leur attachement au Christ dans l’anonymat et dans la prière contemplative, seul avec le Seul, à l’exemple des recluses du Moyen-Âge, tout en conservant un lien étroit avec la vie sacramentelle des paroisses environnantes. À ces personnes, isolées pour diverses raisons (âge, retraite, handicap ou tout simplement goût personnel), pourrait-on refuser l’appellation générique d’ermite urbain? Pour ma part, prêtre à la retraite, je n’hésite pas à me désigner ainsi, sûr d’y trouver encouragement et réconfort dans le monde complexe et merveilleux du Corps mystique du Christ. Puisse l’exemple de Jeanne Le Ber, recluse à Montréal durant 35 ans et morte en odeur de sainteté († 1714), m’inciter à une plus grande fidélité à mon style de vie actuel pour en arriver à être une petite lampe, ou tout au moins une humble sentinelle, dans la nuit de la cité. Amen!
Long may you stand on duty, Fr and guide others by your light of love. Amen
J’aimeAimé par 1 personne